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Classification des infractions

           Une infraction pénale consiste en toute action ou omission portant atteinte à l’ordre social et   faisant   l’objet   d’une   sanction   répressive.  Dans   le  code  pénal,  trois  catégories d’infractions  pénales  sont  envisagées  en vertu du principe de la classification tripartite.  Ce principe  repose sur la gravité de la sanction en fonction de l’infraction commise. On distingue alors : les crimes, les délits et les contraventions, comme le précise l’article 111 du code pénal.

Le crime est considéré comme l’infraction la plus grave. Cette catégorie d’infraction recouvre les actes portant une atteinte grave à l’ordre social qu’on ne peut réparer que par une peine de mort, ou une très longue privation de liberté. Cette dernière peut être une réclusion perpétuelle ou temporaire de 5 à 30 ans, d’une résidence forcée, ou de la dégradation civique écartant ainsi l’agent de la société.

              Les infractions correctionnelles sont la catégorie intermédiaire, quantitativement plus importante que la catégorie des crimes. Le délit cause une atteinte qui n’est pas d’une gravité exceptionnelle, mais suffisante pour que la privation de liberté soit encore de mise. Les peines encourues sont hybrides c’est-à-dire les peines dont le minimum se rattachent à une peine de police et le maximum à une peine correctionnelle. C’est ainsi que le législateur a prévu pour le délit correctionnel une peine d’emprisonnement de plus de deux ans et de moins de cinq ans, et pour le délit de police une peine dont la durée est égale ou inférieure à deux ans et supérieure ou égale à un mois.

           La dernière des catégories regroupe les infractions les moins graves, les contraventions. Elles sont punies de la détention d’une durée inférieure à un mois avec ou sans amende, ou d’une simple amende allant de 30 à 1200Dirhams.

           L’intérêt de cette classification tripartite des infractions n’a pas pour unique utilité de définir une infraction, suivant la catégorie (crime – délits – contraventions) et l’échelle de peine qui lui ont été attribuées. Ses conséquences sont grandes, tant au niveau de la forme et au niveau du fond.

             Au niveau de la forme, la division tripartite fait ressortir des intérêts quant à la compétence du tribunal, à sa composition et à la procédure d’une manière générale. Sur le plan du fond, la classification tripartite révèle des intérêts quant à l’application de la notion de tentative, de la théorie de la complicité, des mécanismes du sursis à l’exécution des peines et de la libération conditionnelle.

2-Classification de l’infraction fondée sur leur nature :

                  Outre la classification tripartite, il existe diverses classifications des infractions. On distingue ainsi les infractions de droit commun, des infractions spéciales soumises à un régime dérogatoire. Il s’agit des infractions militaires, définies par le code de justice militaire, des infractions politiques, en plus d’une nouvelle catégorie d’infraction dite infraction terroriste. Avant de traiter chacune de ses infractions spéciales, il y’aura lieu d’abord de définir les infractions de droit commun qui se définissent comme étant celles qui portent atteinte à l’ordre général non politique et non militaire d’un Etat. Elles sont essentiellement prévues et sanctionnées par le Code Pénal et relèvent des juridictions de droit commun

  • Infraction politique :

            L’Infraction politique, est une infraction qui, par sa nature ou son mobile, porte atteinte à certains intérêts fondamentaux de la nation, elle constitue un trouble certain (trahison, espionnage, sabotage, atteintes aux institutions de l’Etat ou à l'intégrité du territoire national). Seulement à la différence de l’infraction de droit commun, elle ne choque pas profondément la conscience collective de la société.

 

 

             Tout d'abord, c'est la doctrine juridique qui a permis de mettre en place deux critères de distinction des infractions politiques et de droit commun. En effet, elle pose un critère objectif et un critère subjectif. Selon le critère objectif, une infraction est politique dès qu'elle porte atteinte à un intérêt de nature politique ou constitutionnel. Ensuite, selon le critère subjectif, une infraction est politique dès lors que l'intention qui animait l'auteur est politique. En d'autres termes lorsque les mobiles de l'infraction sont politiques, on qualifie l'infraction de politique.

              Le droit positif retient le critère objectif. Le législateur prévoit des peines spécifiques pour les infractions politiques. Il les décrit dans les articles 163 à 218 du code pénal réglementant les atteintes à la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat au sein desquelles on relève les attentats et les complots perpétrés contre la personne du Roi, le Prince Héritier et les membres de la famille royale, les attentats dont le but est soit de détruire, soit de changer le régime ou l’ordre de successibilité au trône, soit de faire prendre les armes contre l’autorité royale.

  • Infraction militaire :

           Une faute qui enfreint la discipline de l’armée constitue une infraction disciplinaire. Outre les fautes disciplinaires qui engendrent une simple application du régime disciplinaire, les infractions pénales militaires relèvent du Code de justice militaire. Ainsi, l’infraction militaire, comme la désertion ou le refus de l’autorité, est sanctionnée par un régime particulier. Celle-ci concerne principalement le militaire lui-même, elle peut aussi concerner une personne civile intégrée à un cadre militaire.

           Le militaire qui commet une infraction ne ressemble pas au délinquant ordinaire. La motivation de son acte, sa matérialisation et ses buts ne reviennent presque jamais à la haine, la cupidité, le profit, l’égoïsme et la bassesse crapuleuse en général. L’action délictueuse militaire s’explique en grande partie par des raisons engendrées par son genre de vie spécial et par la doctrine sociopolitique dont il est convaincu.

  • Infraction terroriste :

           C’est le dahir du 28 Mai 2003, portant promulgation de la loi n°03-03 qui incrimine et réprime cette catégorie d’infractions. A la lecture de ce Dahir relatif à la lutte contre le terrorisme au Maroc deux idées maîtresses se dégagent : d'une part, le souci de se protéger contre toute forme de terrorisme ; de l'autre, faire de cette loi un acte déclaratif de la volonté de combattre le terrorisme international dans ses formes nouvelles. Mais le législateur semble ignorer de faire la distinction entre le fait terroriste et le forfait simple et pur. Car ce qui fait que l'infraction est terroriste, ce n'est pas le fait délictuel ou criminel, mais la circonstance, qui, en matière de terrorisme, se trouve être principalement politique ou confessionnelle ou liée à des croyances de sectes. C’est ainsi que le bandit qui tue lors d'un braquage de banque est un criminel. Celui qui tue pour des raisons politiques, fût-ce dans un braquage de banque, devient terroriste.

 

 

            Selon la loi 03-03 une infraction de terrorisme est « intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ». Peu importe ici le motif des auteurs, toute commission individuelle ou collective de l'infraction, à condition qu'elle s'accompagne d'intimidation, de terreur ou de violence, peut être constitutive de fait terroriste, dès lors qu'elle est rattachable aux catégories cités à l'art 218-1 du code pénal. Si bien que l'on peut dire que toute infraction commise avec terreur, intimidation ou violence au Maroc, pourrait constituer « terroriste » son auteur.

          L’infraction peut représenter aussi bien un seul individu qu’un groupe organisé, et peut regrouper l’acte en lui-même, comme elle peut regrouper les moyens destinés à le mettre en place. Elle relève d’atteintes volontaires à la vie, d’enlèvements, de séquestrations, de détournements de moyens de transport, de détentions d’armes et munitions, comme les armes biologiques etc. …

           Outre la classification des infractions pénales selon leur nature, elles peuvent être classées en fonction de leur mode matériel d’exécution. Cette classification permet de distinguer différentes infractions en fonction des faits qui les constituent et en fonction du temps nécessaire à leur consommation

3-Classification des infractions en fonction de leur mode matériel d’exécution :

       Sous cet angle on se réfère aux modalités d’exécution de l’infraction pour y puiser des critères de classifications. On s’attache alors à la durée de temps utilisée, au nombre des répétitions matérielles, au nombre des aspects matériels de l’espèce délictueuse et enfin à l’importance des réalisations matérielles par rapport au résultat obtenu. D’où les distinctions :

  • Infractions instantanées et infractions continues ;
  • Infractions simples, infractions d’habitude et infraction complexes
  • Enfin infractions matérielles et infractions formelles.

 

  • Infractions instantanées et infractions continues :

           Une infraction peut être exécutée dans un laps de temps court et bref comme elle peut se prolonger dans le temps. Dans le premier cas en parle de l'infraction instantanée dont l’élément matériel s’effectue en un instant, et se consomme en un trait de temps. C’est le cas de la plupart des infractions. La qualification se fait in abstracto, par rapport au texte d’incrimination, et non par rapport au comportement de l’agent. Par exemple, le vol est instantané quelle que soit la durée réelle des opérations de soustraction frauduleuse.

           L'infraction continue est celle dont l’exécution s’étend sur une certaine durée, exprimant le maintien de la volonté infractionnelle. L’infraction continue est dite de plus successive lorsqu’elle s’exprime par des actes de commission successifs. L'exemple le plus courant en est le recel. La prescription de l’infraction continue ne court que si l’auteur de l’infraction continue arrête ses agissements. L’infraction risque d’influer sur la peine dans le sens d’une aggravation, exemple : Séquestration plus d’un mois.

 

           Pour différencier l’infraction instantanée de l’infraction continue on s'attachera à l'élément matériel de l'infraction, c'est-à-dire à l'acte matériel qui a permis de dire qu'une infraction a été commise. En effet, le critère tiendra à l'immédiateté ou à la persistance de l'exécution matérielle de l'infraction. En outre, l'infraction sera instantanée lorsqu'elle se caractérise par une exécution matérielle immédiate et l'infraction continue est celle qui se caractérise par une exécution matérielle qui persiste dans le temps.

  • Infractions simples et infractions d’habitudes et complexes :

            La distinction entre ses trois types d’infractions réside au niveau de l'acte matériel qui a permis de commettre l'infraction. En effet, selon les infractions, certaines sont commises à l'aide d'un seul acte matériel, tandis que d'autres sont commises à l'aide d'une pluralité d'actes. Pour l'infraction simple, elle est une infraction dont la consommation suppose l'accomplissement d'un acte unique.

            De sa part, L'infraction complexe est une infraction dont la consommation suppose l'accomplissement de deux actes de nature différente. L'infraction ne sera considérée comme accomplie que si les deux actes ont été accomplis. Elle est très rare ; Exemple : le délit d'escroquerie. Le délit d'escroquerie suppose, pour être consommé, d'une part, une manœuvre frauduleuse, accomplie par l'escroc, et d'autre part, la remise d'une chose à l'escroc par la victime. L'escroquerie n'est consommée que si les deux actes ont été accomplis.  En revanche le délai de prescription d’une infraction complexe commence à courir à partir de la réalisation du dernier fait.

          L'infraction d'habitude quant à elle, est une infraction dont la consommation exige l'accomplissement de deux actes de même nature par une même personne. L'infraction ne sera consommée qu'au moment où le deuxième acte sera accompli. Il ne faut pas non plus la confondre avec la récidive. La jurisprudence fixe l’habitude au nombre de deux actes successifs, mais reste muette sur le délai qui doit séparer les actes. L’aspect néfaste de cette lacune apparaît au niveau des intérêts.

           Dans ce sens le délai de la prescription de l’action publique doit normalement commencer à courir à partir du jour où l’acte constitutif d’habitude voit sa création. Seulement et comme il n y’a pas de détermination précise de la durée de l’intervalle nécessaire entre les deux actes successifs, la répression de l’infraction d’habitude devient plus sévère car elle risque de ne jamais se prescrire.

           Du point de vue de la compétence, la législation marocaine condamne les auteurs d’une infraction d’habitude, et d’une infraction complexe, même lorsqu’elle se produise dans un pays étranger. Remarquons que la mise en œuvre de cette possibilité se révèle difficile et dépend énormément des conventions relatives à la collaboration internationale en matière de lutte contre la criminalité.  

  • Infractions formelles et infractions matérielles :

            Les infractions matérielles et les infractions formelles supposent toutes les deux l'accomplissement d'un acte matériel. Mais la différence entre ses deux infractions se base sur le critère du résultat de l'acte incriminé.

              Une infraction matérielle est une infraction dont la réalisation suppose un dommage. C'est pourquoi on l'appelle aussi « infraction de résultat ». Elle concrétise le délit au sens objectif classique, c’est-à-dire, le phénomène criminel qui ne se compose que d’un élément légal et d’un comportement extérieur, sans avoir besoin d’un élément moral, d’une intention coupable. 

              À l'inverse, l’infraction formelle, est une infraction consommée par le seul accomplissement de l'acte incriminé, même s'il n'a commis aucun dommage. On parle aussi d'« infraction de moyen ». Ex:

  • l'empoisonnement est défini comme un « attentat à la vie par l'effet de substances qui peuvent donner la mort et quelles qu'en aient été les suites ».
  • le délit de fabrication de fausse monnaie est constitué par le seul fait de fabriquer de la fausse monnaie, sans qu'elle soit mise en circulation.
  • La mise en danger d'autrui suppose pour être consommée le fait d'exposer autrui à un risque immédiat de blessure ou de mort.

       Et contrairement à l’infraction matérielle qui concrétise le délit au sens objectif classique, c’est-à-dire, le phénomène criminel qui ne se compose que d’un élément légal et d’un comportement extérieur, sans avoir besoin d’un élément moral, d’une intention coupable, l’infraction formelle dégage plutôt la notion du délit subjectif au sens étroit, où l’intention joue le rôle prédominant et où les premières manifestations matérielles ne servent que pour la preuve de cette intention et de la culpabilité.

        Il en découle que le droit pénal exige parfois l’intention coupable mais se contente de l’imprudence, de la négligence et de l’inobservation machinale de certains règlements.

Nada Cheraibi

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